Impossible de penser la ville de demain sans datacenter

A l’invitation de Bpifrance le Hub et Turner&Townsend, nous avons évoqué avec beaucoup d’intérêt la place incontournable du datacenter dans la ville de demain.

Le webinar “Les Data Centers dans la Ville de Demain”, qui s’est tenu le 3 février dernier, a réuni Joachim Labrunie, Chef de service technique outils numériques et infrastructures à la Ville de Paris ; Michel Vanhaesbroucke, Directeur d’EDF Pulse Croissance ; Arnaud de Moissac, CEO de DCBrain ; Erik Ferrand, CSO de Qarnot ; et Matthieu Gallego, Directeur adjoint Data Center & Manufacturing de Turner&Townsend France. Il était animé par Antonin Cobolet, Chargé de Relations Corporate chez Bpifrance le Hub.

En introduction, Matthieu Gallego a évoqué les quatre défis auxquels le datacenter est confronté :

  1. La logique de rentabilité du produit, avec les hyperscaleurs et les fonds d’investissements qui doivent dégager un ROI de 7 à 8%.
  2. La demande croissante, qui arrive à une certaine stabilité aux Etats-Unis, ce qui n’est pas encore le cas hors des USA.
  3. La nécessité de construire pour les besoins de demain, un datacenter est-il construit pour les 5 à 6 prochaines années ou pour 20 à 25 ans ?
  4. La disponibilité des terrains et de l’électrique, trop de puissance déstabilise le réseau et demande des datacenters plus petits et plus proches des usages.

Partant de l’expérience de la ville de Paris, Joachim Labrunie présente la ville comme un aménageur public qui cherche à avoir des quartiers avec des approches les plus environnementales possibles. L’approche vertueuse se place à l’échelle d’un quartier et passe par des datacenters de taille réduite. Le datacenter est un levier pour atteindre l’objectif environnemental.

Michel Vanhaesbroucke s’interroge : comment conjuguer développement économique et neutralité carbone ? Il faut s’engager dans des trajectoires de décarbonation, et le numérique est un outil de décarbonation de l’économie. Mais a contrario trop de personnes font le procès du numérique polluant. Il faut fournir au datacenter de l’électricité décarbonée.

Erik Ferrand constate quant à lui une forte hétérogénéité dans l’efficacité énergétique des datacenters. C’est une industrie qui a fait beaucoup de progrès et qui investit beaucoup. Ce qui n’empêche qu’elle doit aussi essayer de mieux récupérer la chaleur. Il faut pour cela distribuer et mettre les équipements au plus proche des besoins de chaleur. Et assurer la capacité de valoriser une source de chaleur qui a été décarbonée. Les DSI doivent quitter les architectures classiques pour se diriger vers des architectures plus distribuées. Et que les politiques incitatives des métropoles deviennent des activités vertueuses et rentables.

La consommation énergétique du datacenter, c’est d’abord les serveurs, tient à rappeler Arnaud de Moissac. Plus il y de serveurs, plus le datacenter consomme, ce qui a un gros impact CO2, en énergie consommée, sur la charge sur le réseau. 70% du bilan carbone d’un serveur est intimement lié à la conception du serveur, et c’est elle qui d’abord consomme du carbone. Il constate également la difficulté de gérer hétérogénéité des équipements à l’intérieur du datacenter, ce qui rend l’optimisation compliquée. Pour atteindre plus de performance, il faut homogénéiser le datacenter.

Matthieu Gallego, de son côté, appelle à aller vers une forme de frugalité avec des standards qui permettent d’être flexible. Nous devons réaliser un travail de standardisation pour que le numérique de demain soit durable. Le datacenter est l’un des assets où le lot électrique représente 60 à 80% de l’investissement. Et le design se fait généralement sur des spec thermiques, et encore… Les mondes de la finance, du bâtiment et de l’IT ont du mal à discuter pour le développement d’un datacenter durable. Quant aux personnes qui ont la culture du datacenter, elles n’ont pas la culture de la donnée, et à ce titre ne disposent pas de données sur les bâtiments. A la différence des bâtiments de Google qui sont truffés de capteurs, ce qui permet de jouer sur la donnée.

Le datacenter doit être vu comme un bien positif, une source d’emplois et d’attractivité économique locale. Ce qui nécessite une prise de conscience et de la vulgarisation afin de ne pas le stigmatiser. Le datacenter a des atouts pour la ville de demain, il doit être pensé avec elle.