Incendies dans les datacenters : comment s’en prémunir ?

Par Julien Brousseau - Responsable Stratégie & Développement Vertical Market chez nVent Eriflex

En 2021, près de 800 000 nouveaux sites web se créent chaque jour. Pour accueillir ces sites et leurs données, y compris celles de nombreuses entreprises, près de 5 000 datacenters sont répartis dans le monde, dont 215 (colocation et hébergement) en France et un tiers en région parisienne. Ces datacenters font tous face aux mêmes risques potentiels : attaques cyber (piratage, vol de données, espionnage), vandalisme (vol de matériel, casse des serveurs), risques météorologiques (inondations, tremblement de terre)… mais le plus important et préjudiciable demeure celui de l’incendie d’origine électrique.

Des menaces en multiplication constante

En France, on observe qu’une majeure partie des incendies dans les datacenters sont liés à une mauvaise ventilation ou une maintenance défaillante provoquant une augmentation de la température des onduleurs. Au-delà d’une certaine température, ces dispositifs, dont la principale fonction est de protéger le matériel informatique ou électronique d’une installation, peuvent provoquer des incendies.

A ces causes, il faut aussi prendre en compte la possibilité d’un départ de feu criminel ou des risques météorologiques : un épisode caniculaire, par exemple, peut entraîner une surchauffe des serveurs, surtout dans les datacenters utilisant un système de climatisation fonctionnant avec l’air extérieur pour rafraîchir les appareils.

Les incendies d’origine électrique sont souvent causés par des installations ou des appareils électriques défectueux. Ces derniers peuvent causer des surtensions, court-circuit, courants de fuite, mais aussi et surtout des arcs électriques. Les points potentiels de départ de feu se situent ainsi sur toute la chaîne électrique : onduleurs, batteries, armoires électriques, groupes électrogènes, citernes de fioul, câbles, serveurs…

Quelles conséquences auxquels s’attendre ?

Les matériaux dont sont composés les datacenters (câbles, composants électroniques, transformateurs…) sont particulièrement combustibles. Résultat, les incendies y sont ravageurs.

Les flammes ou émanations de fumées peuvent être corrosives et diminuent la visibilité en cas d’évacuation et d’intervention des secours, et présentent donc un risque pour les humains. Il faut aussi prendre en compte les personnes vivant à proximité, dans le cas des datacenters situés au sein de zones habitées.

Au niveau économique, les conséquences sont parfois dramatiques : l’incendie qui s’est déclaré dans un datacenter d’OVH a entraîné l’arrêt de 3,6 millions de sites Web pendant plusieurs jours, soit les deux tiers de l’internet français ! Les dégâts sont généralement divisés entre matériels (destruction physique des serveurs et de l’équipement sur place) et immatériels (perte de données professionnelles pour les entreprises hébergées, fermeture de leurs sites et serveurs).

Les coûts peuvent très vite s’envoler. A titre d’exemple, la construction d’un datacenter peut aller jusqu’à 1 milliard d’euros, et le coût financier subi par les entreprises, s’élève, selon Gartner, à 5 600 dollars par minute en moyenne, et jusqu’à 540 000 dollars par heure pour les plus importantes d’entre elles.

Enfin, trop souvent oublié, l’impact environnemental n’est pas à sous-estimer : les datacenters sont remplis de composants électroniques et de métaux rares très polluants pour l’environnement. Les rejets dans l’air des émanations liées à la fonte de ces composants présentent des risques de contamination et de pollution à cause des fumées nocives des plastiques.

Les bons réflexes pour prévenir le pire

Un incendie électrique peut avoir de nombreuses causes notamment, thermiques voire électrostatiques, chimiques ou issues d’une négligence humain. Mais près d’un quart de ceux récemment expertisés étaient dus à une installation électrique défectueuses : un court-circuit, une surintensité, une surtension…

Pour se protéger, les datacenters se doivent d’effectuer régulièrement des audits de conformité, en fonction des évolutions des réglementations. Des actions de prévention sont aussi possibles : mise en place de systèmes de détection incendie plus performants, ou utiliser des technologies plus modernes comme des caméras thermiques pour détecter les îlots de chaleur sont de bons points de départ.

Dans le domaine du raccordement électrique et de puissance, les datacenters peuvent aussi se tourner vers des conducteurs flexibles dénués de cosse associés à un isolant thermoplastique à haute résistance et à faible émission de fumées, sans halogène et retardateur de flammes. Alternatives encore peu utilisées mais idéales à des câbles de grosse section ou à des barres de cuivre rigide, ce type de barres, souples et isolées en cuivre étamé électrolytique, diminue la surface de contact avec les conducteurs en cuivre et sont utilisables y compris dans les environnements dépassant les 100 degrés – indispensable pour les datacenters.

L’isolant à retardateur de flamme sans halogène (conforme au test du fil incandescent à 960°C selon la norme IEC 60695-2 et autoextinguible suivant l’UL 94-V0) offre à ces solutions des avantages tels que la réduction de la quantité de fumée toxique (d’après la norme IEC 60754-1, IEC 62821-1 et UL 2885) et de propagation du feu, avec pour finalité la préservation de l’installation électrique.

En plus des gains évidents en matière de sécurité, ces systèmes offrent aussi plusieurs avantages. Au niveau financier tout d’abord, puisqu’ils éliminent le besoin d’installer des cosses de connexions nécessaires aux branchements par fils électriques. Compactes et faciles de maintenance, ces solutions diminuent également le risque d’erreurs humaines.

Normes, systèmes de prévention incendie, solutions électriques innovantes : il existe de nombreuses solutions pour réduire les incendies sur les datacenters et en réduire les dégâts. D’autant qu’à l’avenir, des secteurs comme la banque vont devoir faire face à une augmentation de leurs besoins. Elles seront encore plus exigeantes quant à la sécurisation des datacenters où leurs données seront hébergées.