Par Olivier Labbé, Directeur Général adjoint de Cap Ingelec et co-fondateur de Cap DC
Les besoins en surface de datacenters croissent d’environ 15 à 20% par an au niveau mondial, en corrélation directe avec l’augmentation de l’activité informatique.
Dans les années 2010, la tendance visionnaire positionnait massivement cette surface à l’intérieur de Datacenters Hyperscale, qui seraient idéalement localisés dans des zones proches du cercle polaire afin d’en optimiser la performance énergétique. A cette époque, qui venait de connaître la paralysie avec l’éruption du célèbre volcan islandais Eyjafjöll, seule la question des risques systémiques semblait pouvoir ralentir cette évolution.
La réalité aujourd’hui n’est plus du tout la même. A cette vision d’hyper-concentration des surfaces est venu se substituer un modèle de continuum, que nous pouvons résumer en 6 niveaux.
- Les Data Centers Hyperscales, qui conservent bien sûr tout leur attrait pour des stockages de masse et des traitement non transactionnels. Leur but ne sera pas d’être près de l’usager, mais d’amener le meilleur coût de production, en positionnant une grande mutualisation de surface là où le foncier et l’énergie sont bon marché.
- Les Data Centers Hub, massivement positionnés en Europe sur les FLAP (Frankfort, Londres, Amsterdam, Paris). Ces zones concentrent des Data Centers de grande taille qui bénéficient d’une interconnexion rapide entre eux. Ainsi, « le Data Center appelle le Data Center » , ces zones sur-attirent les opérateurs car l’interconnexion prime sur le potentiel du marché local. Une fois cette cartographie établie, il est très difficile pour les autres villes de se positionner à leur tour sur ce créneau.
- Les Data Centers Régionaux, dans toutes les autres villes significatives, qui adressent cette fois-ci le potentiel économique local, avec des acteurs de Cloud pour les entreprises ou des hébergeurs qui agissent en premier niveau d’accès vs les Hubs.
- Les Data Centers « 5G », qui vont se positionner au plus près des zones urbaines pour répondre au besoin de latence requis par les usages des populations.
- Les micro-Data Centers, qui vont amener une faible latence lors d’une concentration importante d’usage (un stade, une usine). Par exemple, l’expérience d’un replay video d’une action sportive pour un supporter dans les tribunes pourra être opéré par un streaming local.
- Les pico-Data Centers, qui vont adresser l’usage du particulier, amenant une latence minimum et surtout une gestion des données privées. Par exemple, le traitement d’applications domotiques via les Q-Rads de la société Qarnot Computing (qui utilise la chaleur informatique comme radiateur dans les appartements) , évitera que ce traitement de données privées (fermer la lumière, quitter l’appartement etc…) soit exporté dans le Cloud.
Les trois derniers niveaux font partie de l’univers du Edge. Ils visent à positionner l’espace des datacenters au plus près des usages.
L’arrivée de la 5G (qui va diviser par 20 la durée de connexion « air » ), va encore accélérer ce besoin de diminuer le coût du transport jusqu’au datacenter. Selon IDC, en 2025, 30% des traitements des données seront effectués sur place.
Une nouvelle génération de datacenters pour le Edge
Les trois premiers niveaux de datacenter, répondent, avec des tailles différentes, aux même principes de conception. Peut-être à ceci près que les Data Centers Hyperscales sont souvent mono-utilisateurs, et qu’à ce titre, il leur est possible de positionner des choix de conception plus restrictifs que dans les colocations (qui par définition ne connaissent pas « a priori » les contraintes de leurs futurs occupants). Des préconisations de l’OCP, telles que le Liquid Cooling ou le secours électrique non central, peuvent ainsi être implémentées.
Les trois derniers niveaux de datacenters répondent en revanche à des principes différents.
Pour les micro et pico-Data Centers, l’installation se fera de manière industrielle, la « coque Data Center » étant vendue avec la production informatique. Les principales problématiques seront plus liées à la protection physique ou à la maintenance/exploitation de ces infrastructures.
La catégorie des Data Centers « 5G » amène une nouvelle donne. Ils ont tout du (petit) datacenter mais doivent être implémentés dans des environnements complexes. Positionnés dans des zones urbaines, ils subissent de nombreuses contraintes de sécurité et de respect des normes (telles que les nuisances sonores).
Mais la plus grande complexité réside dans le manque de place pour déployer les lots techniques. Pour installer son datacenter « 5G », l’opérateur ne trouve souvent que des espaces exigües (sous-sol d’immeuble, petit foncier, etc..), qui n’autorisent aucune liberté dans l’aménagement des lots techniques. Parfois, l’installation d’un générateur est impossible, ce qui oblige à déployer une capacité importante de batterie. La notion de surface rectangulaire est souvent à oublier.
Cap Ingelec, spécialiste français de la conception-réalisation de datacenters, a développé un savoir-faire pour permettre aux opérateurs de déployer ce nouveau type d’infrastructures avec agilité.